Syndicat national de l'édition

  • Mot du Président

Discours de Vincent Montagne à l’occasion du cocktail du BIEF et du SNE – Francfort – 11 octobre 2017

« Madame la Ministre de la Culture, chère Françoise Nyssen,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Chers confrères, Chers amis,

C’est pour moi un grand plaisir de vous retrouver, à l’occasion de ce rendez-vous traditionnel à Francfort. Un rendez-vous un peu spécial cette année. Spécial car la France est pays invité d’honneur de la foire internationale de Francfort. Spécial aussi car sommes réunis, non pas sur le stand du BIEF comme de coutume, mais sur ce magnifique pavillon d’honneur. Je voudrais saluer à cette occasion le travail de l’Institut Français et remercier le Commissaire général de Francfort en français, Paul de Sinety et toutes ses équipes, avec qui le dialogue a été quotidien. Et merci à vous tous pour votre présence nombreuse aujourd’hui.

Je ne reviendrai pas sur l’honneur qui est fait par la Foire du livre de Francfort à la France et aux lettres françaises, en partenariat avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, Pro Helvetia, le Grand Duché de Luxembourg et l’Organisation Internationale de la Francophonie.

La présence hier ici à Francfort du Président de la République Emmanuel Macron, de la Chancelière Angela Merkel, les mots forts qu’ils ont prononcés, témoignent de l’importance que revêt cette invitation. Importance sur le plan géopolitique et politique, sur le plan économique et social. Importance sur le plan culturel. Car la Culture, et avec elle le livre, peuvent nourrir l’espoir de contribuer réellement à construire un nouveau projet européen. Et au-delà, la Culture et avec elle le livre sont porteurs d’espoir pour tous les pays du monde.

Nous, éditeurs, et avec nous tous les acteurs de la chaîne du livre, particulièrement les créateurs, les auteurs, sommes conscients de la responsabilité qui nous incombe.

Etre invité d’honneur à la Foire Internationale du livre de Francfort, c’est avant tout pour nous éditeurs une formidable occasion de faire découvrir aux professionnels du livre du monde entier – plus de 120 pays sont présents – l’intelligence et la créativité de nos auteurs, la vitalité, la richesse et l’innovation de notre production éditoriale, le dynamisme de la langue française dans le monde. C’est aussi nouer des coopérations éditoriales avec les éditeurs du monde entier, pour avant tout permettre la circulation des textes et des idées.

Mes amis, soyons-en conscients : L’édition française est active et attractive à l’international.

Le français est la seconde langue traduite après l’anglais. Nous vendons des droits. Nous en achetons aussi. Environ 13 000 titres sont cédés et acquis chaque année. C’est important à signaler. Les aides de l’Institut Français, du Centre national du Livre (merci cher Vincent Monadé) accompagnent notamment ce mouvement dans les deux sens.

Tout ceci est rendu possible grâce au travail des services culturels et chargés du livre dans les ambassades, grâce au travail de l’Institut Français, grâce au travail des responsables des achats et des cessions de droit dans les maisons, grâce au travail du BIEF aussi, de sa présidente Vera Michalski-Hoffmann et de son directeur général, Jean-Guy Boin, associé à celui de toutes ses équipes. Et permettez-moi puisque je parle du BIEF, un petit message amical de notre part à tous, à Jean-Guy Boin, qui, après 17 ans d’engagement sans faille au service du livre, de l’édition et de sa promotion à l’international, va quitter le BIEF à la fin de l’année et vit donc sa dernière foire du livre de Francfort en qualité de Directeur général. Merci cher Jean-Guy pour tout. Et bienvenue à Nicolas Roche qui doit vous succéder prochainement.

Les traductions de livres sont essentielles et donnent une nouvelle vie à un ouvrage, entretiennent et développent un fonds et permettent de promouvoir le travail des auteurs et de leurs idées au-delà des frontières. Elles participent pleinement de la diplomatie d’influence de la France.

Dynamique à l’international, dynamique sur le territoire français, l’édition française se porte plutôt bien. L’année 2016 a été une année dense et particulièrement riche en termes d’activité, 373 millions de livres vendus, en croissance de 4,25% par rapport à 2015. Hors effet scolaire, notre activité sur le plan économique est restée stable et positive de 0,11%.

L’année 2017 promet d’être tout aussi dense, tout aussi riche.

Sur le plan économique, les chiffres de ventes au premier semestre 2017 témoignent d’une activité plus tendue. Selon les estimations GfK, de janvier à septembre 2017, on assiste à une baisse du marché de – 3,6 % en valeur (- 3,8% en volume).

Mais du fait de la poursuite de la réforme des programmes au collège, et porté par le dynamisme de la production éditoriale de la rentrée littéraire  _ 581 romans publiés au cours de cette rentrée ; 191 en littérature étrangère ; 81 premiers romans _ et de la sortie de quelques titres phares, le deuxième semestre devrait permettre d’inverser la tendance du début d’année.

Indépendamment même des chiffres, au sein des industries culturelles et créatives, le poids de l’édition et plus largement du livre est significatif. Un chiffre pour l’illustrer : nous représentons 84 milliards d’euros de revenus directs et indirects sur l’ensemble du territoire, soit davantage que l’automobile ou le luxe. Et au sein de ces industries,  le livre occupe une place de premier plan. Et nous ne cessons pas de rappeler à Bruxelles l’importance des ICC.

Mais cette influence, réelle, ne doit pas masquer la fragilité de notre secteur.

Le livre repose sur un fragile équilibre. Et du maintien de cet équilibre dépend l’existence de toute une chaîne d’acteurs.

Etre éditeur aujourd’hui reste un engagement, une prise de risque, à l’instar de tous les métiers de la création. Des risques qui sont liés notamment aux évolutions sociales et sociétales (les normes changent ; les charges deviennent de plus en plus lourdes…) ; aux innovations technologiques également. Je pense notamment à la transition numérique et avec elle l’émergence d’acteurs internationaux, disposant de métadonnées significatives ; des acteurs pour qui le livre n’est qu’un instrument parmi d’autres, et qui faussent les règles de la concurrence et cherchent à imposer leur modèle.

Une domination sans partage de ces entreprises extra-européennes aurait un impact majeur sur nos cultures. Nous avons besoin de conditions équitables de concurrence et d’un cadre législatif respectant le droit des créateurs et qui garantisse la diversité culturelle en Europe. C’est un débat fondamental pour l’Europe.

Nous devons donc rester vigilants et agir. C’est ce que nous faisons au Syndicat national de l’édition.

La défense du droit d’auteur, remis en question à Bruxelles dans le cadre de la refonte de la directive de 2001, reste au cœur de nos priorités. Avec nos homologues européens et le soutien des pouvoirs publics nous défendons encore et toujours la nécessité de maintenir un cadre juridique et économique clair respectant les droits de chacun. Seul un droit d’auteur fort permet de garantir l’équilibre, l’indépendance, la diversité éditoriale et linguistique, ferments de la liberté d’expression et de création. En France, en Allemagne, comme ailleurs dans le monde. Pour ceux qui ont assisté hier aux discours d’Emmanuel Macron et d’Angela Merkel, il semble qu’une forme d’engagement ait été prise.

Avec nos homologues européens et le soutien des pouvoirs publics, nous veillons également à la préservation de notre patrimoine littéraire, menacé avec l’arrêt par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) contre le projet français ReLIRE. Depuis cet arrêt, des centaines de titres ne sont pas republiés et tombent dans l’oubli. Plus nous tardons et plus des œuvres se perdent. C’est pourquoi, dans le cadre de la refonte de la directive droit d’auteur, nous demandons à l’Union européenne, qu’elle rende légal le projet ReLIRE. Pour permettre la conservation et la mise en circulation des livres oubliés du XXe siècle. Pour le bénéfice de tous. J’ajoute que les 20 000 œuvres déjà accessibles se vendent plutôt bien. Relire est un projet viable, n’en déplaise à ses détracteurs.

Nous devons également veiller au maintien du prix unique du livre, attaqué moins frontalement que le droit d’auteur, mais plus subrepticement. En juin dernier, nous avons, à Paris, aux côtés de  grands opérateurs du commerce de livres en ligne, signé la charte « prix du livre ». Pour que tous s’engagent à respecter la loi sur le prix unique du livre. Pas seulement en théorie. Mais de façon claire, sur les sites et plateformes de vente en ligne. Nous avons accepté le dialogue et accepté de signer cette charte. Mais nous restons extrêmement vigilants. Seul le prix unique du livre garantit l’égalité entre tous les lecteurs, la viabilité de notre réseau exceptionnel de libraires, la diversité de la production éditoriale.

J’ajoute à ces priorités une autre action, que nous devons déployer plus activement. Celle visant à mieux faire connaître nos métiers, le rôle de chacun, et la responsabilité qui nous anime.

Parmi nos métiers, par exemple, les directeurs de collection, que certains organismes français, tels l’AGESSA, changeant unilatéralement de doctrine, ne reconnaissent plus comme participant du travail de création. C’est méconnaître notre fonctionnement. Nous avons entamé des discussions pour que le principe actuel soit conforté et que les directeurs de collection puissent réintégrer le régime de sécurité sociale des auteurs.

Rappeler que les éditeurs assument pleinement une responsabilité sociale et environnementale. Celle avant tout de garantir la liberté, et la diversité de la création et de sa diffusion.

Il est de notre responsabilité de mieux expliquer qui nous sommes et comment nous travaillons. En toute transparence.

Mieux faire connaître nos métiers, défendre les intérêts du livre et de l’édition, en France et dans le monde, sont des actions d’utilité publique.

Elles concernent l’ensemble des acteurs de la chaîne du livre et tous les artisans de la culture. Ce sont des actions que nous menons avec toute l’interprofession du livre.

Avec les auteurs bien sûr, avec qui le dialogue est constant. Avec les bibliothécaires, avec les libraires et notamment le Syndicat de la librairie française, le SLF.

Pour, grâce à une  interprofession forte et soudée, défendre les intérêts du livre et de tous ses acteurs. Et par-dessus tout, promouvoir le livre et la lecture.

Promotion de toutes les littératures, de tous les secteurs de l’édition. Car la lecture est un trésor, qui aide à comprendre le monde, qui aide à se construire, en tant que citoyen éclairé et libre.

Libre, le mot est prononcé.

Le livre est, par excellence, l’objet de la conquête de la liberté. Comme le disait Malala, prix Nobel de la Paix à 17 ans, dans son discours aux Nations unies en 2013, « un enfant, un livre, un crayon peuvent changer le monde ».

Si un livre peut changer le monde, c’est parce qu’il est en soi un objet politique. Politique et dangereux pour certains. Je veux prendre l’exemple d’Asli Erdogan, dont la présence ici à Francfort, nous émeut tant. Nous oblige tant. Asli Erdogan qui déclarait encore récemment à Paris « Je suis juste un écrivain » et qui reste menacée de réclusion à perpétuité en Turquie. Juste pour avoir osé écrire…

Notre ambition est de faire en sorte que jamais les Hommes n’arrêtent d’écrire, jamais n’arrêtent de lire. C’est cela l’objectif fondamental de notre métier d’éditeur, l’objectif qui nous transcende : apporter une contribution précieuse à la réussite d’une société libre et démocratique.

Je vous remercie. »

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