Les cessions de droit à l’international
Véritable relais de croissance pour l’édition, les cessions contribuent, de façon significative, à la marge nette des éditeurs. Cette activité apporte un complément aux droits perçus par les auteurs.
Ces derniers, en confiant la gestion de leurs droits étrangers à leur éditeur, attendent qu’un vrai travail soit mené pour que leurs livres soient le plus présents possible à l’étranger dans des langues autres. C’est à cette fin que l’édition française dispose de services de droits très professionnalisés.
La qualité et la densité du travail fourni par les personnes chargées de ces droits (directeurs ou responsables de droits, mais aussi éditeurs) en France est reconnue dans le monde entier. Tous les types de maisons d’édition, grandes comme petites, spécialisées et généralistes, dans toutes les catégories éditoriales, participent à cet effort de développement à l’international.
SOMMAIRE
L’édition française à l’international en 2023
2023 : une reprise de l’activité à l’international
L’activité des maisons d’édition françaises à l’international est en hausse de 3,4% en 2003 par rapport à 2022. Les dynamiques sont néanmoins différentes entre cessions et coéditions. À périmètre constant, on note une hausse légère du nombre de cessions de 1,7% entre 2022 et 2023. Le nombre de coéditions, à périmètre constant, est en hausse : +13,7% par rapport à 2022.
Droits mondiaux : des différences selon les bassins linguistiques
La cession des droits mondiaux concerne presque un contrat sur deux. Cette part est stable en 2023 par rapport à 2022. Pour des langues comme l’anglais, l’espagnol et l’arabe, la part des droits mondiaux cédés est plus importante que la moyenne. Certains éditeurs anglo-saxons pour la langue anglaise, ou libanais, par exemple, pour la langue arabe négocient fréquemment l’obtention des droits mondiaux lorsqu’ils achètent les droits de traduction de l’ouvrage. Une fois l’ouvrage traduit, ils peuvent alors élargir sa commercialisation à l’ensemble des pays de la zone linguistique concernée.
Stabilité des cessions de droits numériques de traduction
En 2023, la cession simultanée des droits numériques de traduction est relativement stable par rapport aux années précédentes et représente près de 26,4% de l’ensemble des contrats de cessions négociés. Les contrats de cessions de droits numériques de traduction conclus séparément restent rares, de l’ordre de 1,2% du total des contrats en 2023. Une précision méthodologique est nécessaire : il s’agit rarement de titres pour lesquels les responsables de droits ont cédé uniquement les droits numériques de traduction (sans les droits papier) mais plutôt d’avenants à de précédents et anciens contrats pour lesquels les droits avaient été cédés uniquement pour le papier.
Une source de revenus complémentaire pour les maisons d’édition
L’activité de cessions de droits étrangers constitue une source de revenus complémentaires pour les maisons d’édition. Cette activité représente entre 3 à 5% du chiffre d’affaires des maisons d’édition ayant répondu à l’enquête. La part du chiffre d’affaires de l’activité des coéditions dans le chiffre d’affaires total des maisons est, d’un point de vue méthodologique, plus difficilement exploitable en raison des coûts de fabrication : néanmoins, elle peut atteindre jusqu’à 30% du CA total de la maison ou du département éditorial concerné. Les cessions de droits, par le revenu qu’elles génèrent, participent à l’équilibre financier des maisons d’édition. Quant aux cessions en coédition, elles permettent souvent d’amortir les coûts de fabrication de certains ouvrages illustrés.
Les catégories éditoriales les plus appréciées à l’international
La production éditoriale française connaît un vif succès à l’international. Traditionnellement, la catégorie éditoriale où le nombre de titres cédés dominait était la jeunesse. Mais, depuis 2020 et pour la quatrième année consécutive, la bande dessinée arrive en tête avec 3 852 cessions sur l’année. Bande dessinée, jeunesse, fiction : à elles seules, ces trois catégories représentent 72,2% des titres cédés. Cette part est stable par rapport aux années précédentes. La bande dessinée confirme sa place de leader dans les ventes à l’international (30,9% des cessions). Elle est suivie par la jeunesse qui représente 24,5% des cessions. En 2023, ce sont, au total, 3 852 titres qui ont été cédés à des éditeurs étrangers en bande dessinée et 3 059 en jeunesse. Comme les années précédentes, il est utile de rappeler que certaines spécificités du secteur de la jeunesse et de la BD sont de nature à tempérer ou à relativiser leurs belles performances. En effet, il peut y avoir en jeunesse de grandes séries (et donc des contrats sur 20, 30 ou même 60 titres), tout comme il peut y avoir plusieurs tomes en bande dessinée. Par exemple, quand un éditeur étranger achète une histoire, il peut signer six contrats s’il y a six tomes. Le nombre de cessions déclarées croît donc mécaniquement. La fiction (2 090 titres cédés) et la non-fiction (Sciences humaines et sociales, 1 202 titres et Actualité, essais & documents, 878 titres) représentent 33,4 % du total des cessions de droit, un poids stable par rapport à 2022. Ces traductions jouent un rôle moteur dans la diffusion et le rayonnement de la pensée française à l’international. En 2023, la catégorie du livre pratique représente 6,3% du total des titres cédés.
Les coéditions : des partenariats européens en jeunesse
La fabrication des livres illustrés, particulièrement des livres de jeunesse, induit fréquemment la nécessité de coéditer le titre avec des partenaires pour en partager les coûts. Avec 1 871 titres, le livre de jeunesse représente près de 86% du volume total des coéditions de 2023. Ces coéditions sont majoritairement conclues avec des pays européens, notamment avec l’Espagne (avec des livres coédités en espagnol et en catalan), l’Italie, l’Allemagne, mais aussi le Portugal, la Grèce, la République tchèque ainsi que le Danemark. On peut remarquer le nombre important de coéditions effectuées avec des éditeurs anglo-saxons (193 en 2023) sur des marchés réputés difficiles à pénétrer. Il faut également noter l’apparition de pays plus éloignés comme Taïwan par exemple.
En quelles langues la production française est-elle traduite ?
Si l’on prend l’ensemble des contrats conclus, aussi bien en cession qu’en coédition, l’espagnol est, pour la deuxième année consécutive, la principale langue de traduction des ouvrages français (11 % du total), devant la langue chinoise. En ajoutant à l’espagnol et au chinois les langues italienne, allemande, anglaise et polonaise, on atteint plus de la moitié du total des contrats conclus. Le poids relatif des cessions et des coéditions au sein de ces onze premières langues de traduction est riche en enseignements, notamment en ce qui concerne les contrats conclus avec la Chine. Le savoir-faire des imprimeurs chinois donne l’opportunité aux éditeurs chinois d’acquérir des droits de traduction, plutôt que d’être partenaires en coédition.
Langues de traduction et catégories éditoriales
En 2023, le chinois reste la langue la plus importante en termes de cessions pour la jeunesse ainsi que pour les livres d’art. Le marché de langue allemande qui était particulièrement réactif aux titres français dans le secteur de la bande dessinée les années précédentes, cède sa place au polonais cette année. Les titres français de Sciences humaines et sociales (SHS) ont connu un bon accueil pour les traductions vers la langue espagnole, tout comme ceux du segment Actualité, essais & documents, ainsi que les ouvrages de religion et ésotérisme. Quant à la Belgique, elle fait sa première entrée sur le podium en tant que meilleurs pays acheteur de titres en pratique pour des traductions en néerlandais.
Conclusion
Avec une hausse globale de 3,4% du nombre de contrats de cessions de droits de traduction et de coéditions, l’activité des maisons d’édition françaises à l’international en 2023 a été dynamique. La reprise d’activité sur les coéditions est nette par rapport à 2022 : le nombre de contrats est en hausse de 13,7%, avec parfois un effet « collection » dans le domaine de la jeunesse. La hausse est moins franche sur l’activité des cessions avec une croissance de 1,7% du nombre de contrats car le bilan s’est révélé très contrasté selon les maisons. Un point de convergence a néanmoins été acté : la baisse continue du nombre de contrats avec la Chine, pourtant longtemps premier partenaire de la France à l’international. L’activité des maisons à l’international évolue dans un contexte en mutation, notamment avec l’irruption de l’intelligence artificielle – et ses nombreux impacts sur la traduction – mais aussi, dans une moindre mesure, avec le développement d’un nouveau type d’exploitation via les cessions de droits audio en langues étrangères. Espérons qu’en 2024, les échanges des maisons d’édition françaises avec leurs partenaires étrangers se poursuivent et se consolident, et que les cessions et les coéditions continuent de participer au dialogue et à l’enrichissement des cultures.
L’édition française à l’international en 2022
2022 : Une baisse de l’activité à l’international
L’activité des maisons d’édition françaises à l’international est en baisse de -14,5% en 2022 par rapport à 2021. Les évolutions sont un peu différentes entre cessions et coéditions. À périmètre constant, on note une baisse du nombre de cessions de 13,8% entre 2021 et 2022.
Le nombre de coéditions, à périmètre constant, est en baisse : -18,7% par rapport à 2021.
Droits mondiaux : des différences selon les bassins linguistiques
La cession des droits mondiaux concerne presque un contrat sur deux. Cette part, relativement stable ces dernières années, est en hausse en 2022.
Pour des langues comme l’anglais, l’espagnol et l’arabe, la part des droits mondiaux cédés est plus importante que la moyenne. Certains éditeurs anglo-saxons pour la langue anglaise, ou libanais, par exemple, pour la langue arabe, négocient fréquemment l’obtention des droits mondiaux lorsqu’ils achètent les droits de traduction de l’ouvrage. Une fois l’ouvrage traduit, ils peuvent alors élargir sa commercialisation à l’ensemble des pays de la zone linguistique concernée.
Légère hausse des cessions des droits numériques de traduction
En 2022, la cession simultanée des droits numériques de traduction est en légère hausse par rapport aux années précédentes et représente près de 29,6% de l’ensemble des contrats de cessions négociés.
Les contrats de cessions de droits numériques de traduction conclus séparément restent rares, de l’ordre de 1,5% du total des contrats en 2022. Une précision méthodologique est nécessaire : il s’agit rarement de titres pour lesquels les responsables de droits ont cédé uniquement les droits numériques de traduction (sans les droits papier) mais plutôt d’avenants à de précédents et anciens contrats pour lesquels les droits avaient été cédés uniquement pour le papier.
Une source de revenus complémentaire pour les maisons d’édition
L’activité de cessions de droits étrangers constitue une source de revenus complémentaires pour les maisons d’édition. Cette activité représente entre 4 à 6% du chiffre d’affaires des maisons d’édition ayant répondu à l’enquête.
La part du chiffre d’affaires de l’activité des coéditions dans le chiffre d’affaires total des maisons est, d’un point de vue méthodologique, plus difficilement exploitable en raison des coûts de fabrication : néanmoins, elle peut atteindre jusqu’à 30% du CA total de la maison ou du département éditorial concerné. Les cessions de droits, par le revenu qu’elles génèrent, participent à l’équilibre financier des maisons d’édition. Quant aux cessions en coédition, elles permettent souvent d’amortir les coûts de fabrication de certains ouvrages illustrés.
Les catégories éditoriales les plus appréciées à l’international
La production éditoriale française connaît un vif succès à l’international. Traditionnellement, la catégorie éditoriale où le nombre de titres cédés dominait était la jeunesse. Mais depuis 2020 et pour la troisième année consécutive, la bande dessinée arrive en tête avec 3 763 cessions sur l’année. Bande dessinée, jeunesse, fiction : à elles seules, ces trois catégories représentent 73,6% des titres cédés. Cette part est stable par rapport aux années précédentes.
La bande dessinée confirme sa place de leader dans les ventes à l’international (30% des cessions). Elle est suivie par la jeunesse qui représente 26,8% des cessions. En 2022, ce sont, au total, 3 763 titres qui ont été cédés à des éditeurs étrangers en bande dessinée et 3 331 en jeunesse. Comme les années précédentes, il est utile de rappeler que certaines spécificités du secteur de la jeunesse et de la BD sont de nature à tempérer ou à relativiser leurs belles performances. En effet, il peut y avoir en jeunesse de grandes séries (et donc des contrats sur 20, 30 ou même 60 titres), tout comme il peut y avoir plusieurs tomes en bande dessinée. Par exemple, quand un éditeur étranger achète une histoire, il peut signer six contrats s’il y a six tomes. Le nombre de cessions déclarées croît donc mécaniquement. La fiction (2 053 titres cédés) et la non-fiction (SHS, 1 299 titres et Essais, 837 titres) représentent 33,7 % du total des cessions de droit, un poids légèrement plus élevé qu’en 2021. Ces traductions jouent un rôle moteur dans la diffusion et le rayonnement de la pensée française à l’international. En 2022, la catégorie du livre pratique représente 5,6% du total des titres cédés.
Les coéditions : partenariats européen en jeunesse
La fabrication des livres illustrés, particulièrement des livres de jeunesse, induit fréquemment la nécessité de coéditer le titre avec des partenaires pour en partager les coûts. Avec 1 762 titres, le livre de jeunesse représente près de 92% du volume total des coéditions de 2022.
Ces coéditions sont principalement conclues avec des pays européens, notamment avec l’Espagne (avec des livres coédités en espagnol et en catalan), l’Italie, et l’Allemagne. On peut remarquer le nombre important de coéditions effectuées avec des éditeurs anglo-saxons (109 en 2022) sur des marchés réputés difficiles à pénétrer. Il faut également noter l’apparition de pays plus éloignés comme l’Argentine, Taïwan ou la République tchèque dans les pays partenaires de coéditions.
En quelles langues la production française est-elle traduite ?
Si l’on prend l’ensemble des contrats conclus, aussi bien en cession qu’en coédition, l’espagnol est, pour la première fois la principale langue de traduction des ouvrages français (11% du total). Il s’agit d’un fait notable, car c’est la première année où le chinois arrive en seconde place. En ajoutant à l’espagnol et au chinois les langues italienne, allemande, anglaise et coréenne, on atteint plus de la moitié du total des contrats conclus.
Le poids relatif des cessions et des coéditions au sein de ces onze premières langues de traduction est riche en enseignements, notamment en ce qui concerne les contrats conclus avec la Chine. Le savoir-faire des imprimeurs chinois donne l’opportunité aux éditeurs chinois d’acquérir des droits de traduction, plutôt que d’être partenaires en coédition.
Langues de traduction et catégories éditoriales
En 2022, le chinois est la langue la plus importante en termes de cessions pour trois catégories éditoriales : la jeunesse, les sciences humaines et sociales et les livres d’art. Depuis plusieurs années déjà, le marché de langue allemande est particulièrement réactif aux titres français dans le secteur de la bande dessinée, et cette tendance se confirme à nouveau en 2022. Les titres français de fiction ont connu un bon accueil en Italie, tout comme ceux du segment Actualité, Essais & Documents. Quant à la Roumanie, elle fait sa première entrée sur le podium en tant que meilleur pays acheteur de titres en pratique pour des traductions en roumain.
Conclusion
Avec une baisse de 14,5% du nombre de contrats de cessions de droits de traduction et de coéditions, l’activité des maisons d’édition françaises à l’international s’est nettement contractée en 2022. Plusieurs facteurs sont entrés en jeu dans cette diminution : face aux aléas de la hausse des coûts de l’énergie et du papier à l’échelle mondiale, les partenaires étrangers ont parfois été plus frileux avant d’acheter les droits d’ouvrages français et d’en supporter les coûts de traduction. La guerre en Ukraine a ralenti, comme on pouvait s’en douter, les échanges avec les éditeurs ukrainiens, mais aussi avec les éditeurs russes avec lesquels de nombreux nouveaux projets ont été mis en pause ou abandonnés. Quant à la Chine, qui était depuis de nombreuses années le premier partenaire de la France à l’international, il semblerait que l’élan des éditeurs chinois envers la production française se soit essoufflé en 2022.
Cette baisse doit toutefois être relativisée : 2021 avait été une année particulièrement exceptionnelle en chiffre d’affaires, comme en nombre de titres ayant fait l’objet de contrats ! Par ailleurs, la baisse du nombre de contrats en 2022 ne signifie pas nécessairement une baisse proportionnelle des revenus, qu’il s’agisse des contrats de cessions ou de coéditions.
Il faut souhaiter qu’en 2023 le livre français retrouve sa dynamique à l’international, qu’il s’agisse des traductions en langues étrangères, des coéditions ou des cessions de droits audio, nouveau type d’exploitation qui se développe et que le SNE prévoit de suivre à partir de l’année prochaine.
Quelques chiffres de 2022
Les droits de traduction de 14 342 titres ont été cédés en 2022 : 12 423 pour des contrats de cession (86,6% du total) et 1 919 pour des contrats de coédition (13,4%).
L’activité des maisons d’édition françaises à l’international s’est contractée en 2022, en baisse de 14,5% par rapport à 2021 : à périmètre constant, le volume des cessions de droits a diminué de 13,8% et celui des coéditions de 18,7%.
Hors coéditions, plus d’un titre sur deux (57% du total) est cédé en bande dessinée ou en jeunesse.
Pour la première fois, ce n’est pas le chinois mais l’espagnol qui arrive en tête des principales langues de traduction (+ de 1 590 contrats conclus). Viennent ensuite le chinois, l’italien, l’allemand, et l’anglais.