La lutte contre le piratage
Le marché du livre s’appuie sur un équilibre économique fragile. C'est dans le but de préserver cet équilibre que les éditeurs participent à la mise en place de bonnes pratiques.
SOMMAIRE
Prix unique du livre et contrefaçon… le SNE reste très mobilisé
Le Syndicat national de l’édition mène depuis plusieurs années des actions de fond pour faire respecter la loi sur le prix unique des livres sur les plates-formes de vente en ligne (marketplaces) et lutter contre la contrefaçon.
Marketplaces, une charte pour réglementer les pratiques
Après avoir constaté sur des sites de vente en ligne et les marketplaces qui leur sont associées, des offres de livres neufs ne respectant pas le prix fixé par les éditeurs et des pratiques d’affichage de prix d’ouvrages d’occasion nuisant à la perception du prix unique du livre, le Syndicat national de l’édition (SNE), le Syndicat de la librairie française (SLF) et le Syndicat des distributeurs de loisirs culturels (SDLC) ont saisi le médiateur du Livre le 14 janvier 2015.
Le médiateur du livre a réuni les acteurs concernés afin de trouver les termes d’une charte de bonnes pratiques, visant à mieux encadrer les pratiques de vente en ligne sur les marketplaces et de veiller à leur conformité avec la loi Lang sur le prix unique du livre.
La charte des marketplaces repose sur deux axes :
- le respect de la législation sur le prix du livre par les revendeurs.
Les marketplaces s’engagent à mettre en place un mécanisme de prévention ou de signalement automatisé des infractions à la législation à destination des organisations professionnelles ou encore de notification automatique au vendeur contrevenant ;
- la présentation des offres dans les lieux de vente physiques et dématérialisés proposant des livres neufs et des livres d’occasion, avec des pratiques d’affichage permettant de distinguer clairement le neuf et l’occasion a minima sur les fiches produit des sites.
La discussion doit se poursuivre afin de définir, au plus tard 6 mois après la signature de la charte, les modalités de distinction du neuf et de l’occasion sur les pages de résultats des recherches.
Le SNE n’a accepté de signer cette charte aux côtés de l’ensemble des parties concernées qu’à la condition qu’un calendrier précis soit fixé pour faire aboutir les discussions sur ce dernier point.
La signature de la charte est donc une étape, dans l’attente d’un engagement de toutes les parties qui permettra de parvenir aux équilibres souhaités et d’assurer un suivi des pratiques des marketplaces.
2015 : de nombreuses avancées concernant la lutte contre la contrefaçon sur Internet.
Le 23 mars 2015, le SNE a signé la charte d’engagement des professionnels de la publicité contre les sites illicites, placée sous l’égide du ministère de la Culture.
Objectif : inciter les acteurs de la publicité en ligne à ne plus alimenter en ressources publicitaires les sites de téléchargement illégal. Les acteurs commerciaux, comme ceux de la publicité, sont libres de choisir leurs partenaires commerciaux – et donc d’écarter les sites dont l’activité est majoritairement tournée vers le téléchargement illégal. Afin de vérifier la mise en œuvre de cette charte, un comité de suivi a été créé. Il sera composé paritairement des acteurs de la publicité et des ayants droit.
Les acteurs du paiement en ligne sont également invités à participer à cette lutte contre la contrefaçon en ligne. Un comité de suivi des bonnes pratiques dans les moyens de paiement en ligne auquel participe le SNE a été créé dans le but, là aussi, de couper l’approvisionnement financier des sites illicites.
Outre la signature de la charte, le SNE a également été à l’initiative de nouvelles avancées dans la lutte contre la contrefaçon. Soutenus par la Sofia qui finance 50% des sommes investies, de plus en plus d’éditeurs utilisent le service proposé par la société Surys (anciennement baptisée Hologram Industries). Grâce à une technologie d’empreinte numérique, ce service repère les contrefaçons sur Internet et envoie aux responsables concernés des notifications, puis s’assure que le livre numérique a bien été retiré. Aujourd’hui, Gallimard, Flammarion ou Actes Sud font déjà appel à Surys pour lutter contre les contrefaçons en ligne.
Rappel du contexte juridique
Voici un rappel des moyens permettant d’obtenir le retrait de contenus illicite en ligne passant par la mise en cause des sites présentant des contenus litigieux
Aux termes de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, les éditeurs peuvent s’adresser à l’hébergeur d’un site pour l’informer de la présence de contrefaçons accessibles via ce site et lui demander de les retirer. Cette procédure dite de « notification et retrait », très encadrées dans sa forme, est efficace pour obtenir le retrait immédiat des contenus, même s’il ne s’agit qu’une solution au cas par cas.
Après avoir envisagé un recours au dispositif mis en place par les lois Hadopi et Hadopi 2 de 2009, le SNE a concentré ses recherches sur une solution collective de procédure automatisée de notification et retrait en application de la LCEN.
Rappelons que le dispositif Hadopi vise l’utilisateur des réseaux d’échange et de partage de fichiers entre internautes (peer to peer).
La procédure de notification et retrait est une démarche dirigée contre l’auteur du site et l’hébergeur. Elle concerne davantage le téléchargement direct sur des sites Internet ou des « cyberlockers » qui hébergent du contenu illicite (Rapidshare…).
Objectif d’une solution collective contre le piratage
La recherche systématique d’œuvres accessibles de manière illicite sur Internet nécessite de déployer des moyens humains et technologiques considérables.
Pour les éditeurs ne pouvant pas consacrer ces moyens à la lutte contre le piratage et/ou souhaitant expérimenter de nouvelles solutions, le SNE a mené un important travail de prospection sur les solutions collectives de lutte contre le piratage en examinant avec soin les outils juridiques et techniques existant.
La recherche d’une solution collective a été guidée par les objectifs suivants :
- Retrait rapide des fichiers ;
- Envoi massif de demandes de retraits face à la prolifération de contenus illicites ;
- Automatisation des démarches pour alléger le travail dans les maisons d’édition ;
- Solution technique efficace et adaptée à l’évolution des réseaux et à la dimension transfrontalière des échanges ;
- Solution sur mesure pour le livre : volume et diversité des fichiers en circulation ;
- Existence d’outils statistiques (mesure de l’efficacité de l’action et de l’intensité du piratage) ;
- Contraintes de coûts pour les éditeurs : la mutualisation du service pour les adhérents du SNE permet de rendre accessible à davantage d’éditeurs une solution basée sur une tarification dégressive en fonction du volume de titres mis en surveillance.
Leak ID, une solution mutualisée pour les adhérents du SNE
La solution proposée par LeakID couvre la recherche sur les sites de téléchargement en ligne et de streaming de contenus illicites. En réponse aux publications de liens vers des contenus illicites et leur remise en ligne répétée, elle propose une automatisation des démarches et permet un envoi massif de demandes de retraits et de déréférencement sur Google. Elle assure ainsi la surveillance des réseaux pour le compte des maisons d’édition. De nouveaux services, notamment pour le livre audio, sont également disponibles.
Concrètement, grâce à une recherche par mots-clés, LeakID notifie puis traite en continu le site visé pour s’assurer du retrait des contenus illicites. En l’absence de retrait, l’hébergeur du site est averti pour obtenir la disparition du lien ou fichier concerné ; en parallèle de cette démarche, une demande de déréférencement est adressée à Google dans les douze heures qui suivent l’identification d’un contenu piraté.
Combien ça coûte ?
La mutualisation du service pour les adhérents du SNE permet de rendre accessible aux éditeurs une solution basée sur une tarification dégressive : le barème établi varie selon le nombre total des œuvres de référence mises en surveillance tous éditeurs confondus.
À partir de 10 000 titres surveillés (tous éditeurs confondus), le tarif sera de 1€ par titre et par mois.
L’intérêt des éditeurs et des auteurs étant commun dans la lutte contre la contrefaçon des ouvrages, la SOFIA soutient financièrement cette initiative à hauteur de 50% des sommes facturées par Leak ID pour les 6 000 premières œuvres de référence (par éditeur), soumises au service, puis à hauteur de 30% pour les œuvres de référence excédant ce nombre, dans la limite du montant adopté annuellement par la SOFIA pour l’ensemble des éditeurs.
Les éditeurs souhaitant recourir à ce service établissent un lien direct avec Leak ID qui assurera le déploiement de la solution et délivrera l’ensemble des informations et conseils techniques utiles. La facturation qui leur sera adressée sera préalablement minorée de l’aide SOFIA.
Le SNE contre Google
Dans le cadre d’accords conclus avec de grandes bibliothèques universitaires américaines et européennes, Google a numérisé des ouvrages appartenant à leurs fonds et les a mis en ligne, soit dans leur version intégrale, soit sous la forme d’extraits et ce sans l’autorisation préalable des titulaires de droits d’auteur.
La bibliothèque numérique, développée par Google et accessible via son système de recherche dédié « Google Recherche de Livres » est alimenté par des ouvrages numérisés dans le cadre de deux programmes distincts : le Programme Partenaire Google Livre et le Programme Bibliothèque. La procédure judiciaire ne concerne que le Programme Bibliothèque, l’adhésion au Programme Partenaire relevant de la politique commerciale de chaque maison d’édition.
Le SNE et la SGDL sont intervenus volontairement dans la procédure engagée par le Groupe La Martinière contre Google en octobre 2006 au nom de la défense de l’intérêt collectif de leurs adhérents et pour réparer le préjudice causé à l’ensemble de la profession. Le fondement principal de l’action est la contrefaçon de droits d’auteur constituée par une atteinte au droit de reproduction (numérisation des œuvres protégées sans autorisation des titulaires de droits) et une atteinte au droit de représentation avec la diffusion d’extraits d’œuvres sans l’autorisation des ayants droit.
Pour justifier ses agissements par l’exception de « Fair use » (Le bénéfice de cette exception conduit à tolérer des actes normalement contraires aux prérogatives exclusives des ayants droit. Il s’agit d’une construction juridique américaine.), Google a demandé que le litige soit soumis à la loi américaine aux motifs que la numérisation des livres a été effectuée aux Etats-Unis et que le service « Google Recherche de Livres » est hébergé sur les serveurs de Google Inc. à Mountain View. Par ailleurs, Google a soulevé l’exception légale de courte citation (article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle) dans le cas où le litige serait soumis à la loi française.
Le Tribunal de Grande Instance a condamné, le 18 décembre 2009, la société Google Inc. pour avoir numérisé et rendu accessibles en ligne les couvertures et de nombreux extraits d’ouvrages protégés, sans l’autorisation préalable des ayants droit.
Le 11 juin 2012, le SNE et Google ont mis fin au contentieux qui les opposait depuis 2006 sur la numérisation et l’indexation des livres. Un accord-cadre visant à encadrer la numérisation des œuvres indisponibles est proposé par Google aux éditeurs français. Pour les éditeurs souhaitant se procurer cet accord-cadre, vous pouvez contacter Google à l’adresse suivante : books-partner@google.com